Colloque international organisé par l’université Paris-Sorbonne et l’EHESS à Paris, les vendredi 23 et samedi 24 mai.
L’espace muséographique dévolu, en Europe centrale et en ex-URSS, à la mémoire collective des violences de masse – génocides, camps, déportations, famines, persécutions – a connu, depuis la chute du Mur, un remaniement radical. De nouveaux enjeux politiques, sociaux, culturels, scientifiques, l’accès à des documents jusque-là inaccessibles, la circulation des idées et des savoirs à travers des frontières désormais ouvertes ont permis à la fois de créer des façons inédites de documenter le passé traumatique et d’initier une réflexion à l’échelle européenne, voire mondiale sur cette mise en mémoire du passé.
Des musées montrant les violences du régime soviétique ont ainsi vu le jour : musées du Goulag ou musées de l’occupation dans certaines ex-républiques ; les violences subies par les populations sous le nazisme ont reçu un éclairage nouveau. De nombreuses villes à l’Est de l’Europe se sont dotées de musées documentant les séquelles des deux totalitarismes dont elles ont tour à tour été victimes. Enfin, depuis quelques années on assiste à la création de musées virtuels qui ont notamment pour vocation de constituer un fond d’archives orales, support nouveau et bien différent de la photographie, de l’objet et du texte.
L’abondance de traces ainsi constituées pose de nombreuses questions d’ordre méthodologique et éthique quant à la pertinence et la possibilité de la représentation des violences et de la reconstruction du passé.
Par ailleurs, la muséification laisse place au non-dit, au vide mémoriel, enfin à la déformation ou la falsification des données historiques. La compréhension de ces espaces totalement nouveaux ou remaniés ne peut se concevoir sans appréhender l’amplitude des enjeux mémoriels et le jeu croisé des expériences antagonistes.
A l’inverse, ces espaces révèlent un pan essentiel de la culture actuelle. Leurs architectures et scénographies, envisagées dans leur intéraction avec le paysage urbain ou naturel, reflètent et modèlent à la fois l’auto-représentation des Européens. Entre l’expérimentation artistique ou technique et la mise en place de discours, représentations, idéologies, le musée est un lieu paradoxal de cristallisations mais aussi de négociations mémorielles.
On remarquera que dans la construction des dispositifs mémoriels et des représentations des violences de masse, les modèles de la mise en mémoire de la Shoah, notamment muséale, depuis 1945 et jusqu’à nos jours, occupent une place importante. D’autres espaces mémoriels se constituent sur le modèle des musées de guerre tels qu’ils étaient conçus en URSS et en Europe de l’Est d’avant 1989. Enfin certains pays optent pour une approche ethnique plus qu’universelle. C’est cette circulation de modèles à travers le dialogue ou l’affrontement des mémoires que nous nous proposons d’aborder au cours de ce colloque.
Vendredi 23 mai
Panel 1 : QUE MONTRER, COMMENT MONTRER, L’AUTHENTICITÉ DE LA TRACE
(modérateur Delphine Bechtel)
Panel 2 : L’IMPACT DE LA DÉMATÉRIALISATION, NOUVELLES NARRATIONS ET ÉMERGENCE DU VIRTUEL
(modérateur Luba Jurgenson)
Samedi 24 mai
Panel 3 : LA CENTRALITÉ DE LA SHOAH, LA CIRCULATION DES MODÈLES ET LA MONDIALISATION DE LA MÉMOIRE
(modérateur Frédéric Crahay, Mémoire d'Auschwitz ASBL)
Panel 4 : LES MODÈLES CONCURRENTS : DOCUMENTER L’IMBRICATION DES VIOLENCES DES TOTALITARISMES
(modérateur Philippe Mesnard)
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