Fondation Auschwitz - Analyses et études de 2014
Analyses et études de 2014
2023
Questions humanitaires et droits de l'Homme

  • Antonia Garcia Castro (Radio Universidad de Chile) : Quand la victime est introuvable (PDF)
    Consacré à l’Association chilienne de Familles de Détenus-Disparus, cet article examine les enjeux de la qualification des victimes pendant et après la dictature (1973-1989). On s’intéresse en particulier aux logiques de l’action des familles et à la manière dont elles se postulent d’abord comme les représentantes d’un tiers qui est aussi et avant tout – à leurs yeux – un acteur politique.

 

  • Elisabeth Jelin (CONICET / IDES, Buenos Aires) : Familles et victimes. Quelle place pour les citoyens ? (PDF)
    Dans l’expérience argentine, la visibilité et la légitimité des voix ancrées dans la perte familiale tout d’abord, puis dans le vécu corporel dû à la répression et la participation politique militante des années 1970, délimitent un cadre politique dans lequel les notions d’« affecté(e) » et de « citoyen(ne) » sont deux éléments antagoniques. Au sein de cette dichotomie, la première notion semble prendre le pas sur la seconde. Cet article s’intéresse à la centralité du familisme et de la voix du témoin dans les politiques de la mémoire actuelles portant sur les crimes commis par la dernière dictature militaire en Argentine (1976-1983). En ce sens, l’analyse porte donc sur l’impact de la présence publique des voix des proches des victimes et de celles des survivants dans l’exclusion d’autres voix sociales dans le cadre du débat public sur le sens du passé et sur les politiques qui doivent être mises en place.

 

  • Claudia Feld (CONICET / IDES, Buenos Aires) : « Subversifs », « torturés », « NN ». Comment la presse argentine de la transition a-t-elle nommé les victimes de la terreur d’État ? (PDF)
    En 1984, au cours des premiers mois de la transition démocratique en Argentine, les médias ont commencé à aborder, comme sujet principal, la question des disparus et la répression clandestine. Dans le cadre du « destape » (révélation) médiatique, qui commença dans la presse non censurée, cette présentation journalistique, loin d’informer clairement sur le terrorisme d’État, a généré un spectacle macabre et sensationnaliste que certains observateurs de l’époque ont appelé le « show de l’horreur ». Cet article analyse comment a été construite la figure de la victime de la disparition forcée dans la presse argentine publiée entre janvier et mai 1984. L’utilisation de la notion de « victimes » de violations des droits de l’homme ou de « victimes innocentes » de la répression politique pour faire référence aux disparus n’a pas surgi immédiatement dans l’espace de la presse. D’autres figures, telles que celle de « subversifs », « torturés » ou « NN » étaient utilisées. Dans la mesure où cette couverture médiatique a été la première présentation des faits concernant les disparus à un public massif, notre analyse permet de proposer certaines hypothèses relatives aux « luttes entre mémoires » au début de la transition.

 

  • Susana Draper (Princeton University) : Victimes du souvenir et de l’oubli (PDF)
    Dans cet article, je souhaite m’intéresser à comment émerge la figure de la victime dans l’espace textuel féminin. Cette dernière est liée à une forme de résistance à l’élaboration de stéréotypes de la catégorie autour de deux centres qui dominent la vision du passé. D’un côté, il y a les héros militants qui se souviennent ou sont remémorés dans le cadre d’un récit épique et courageux (masculin). De l’autre, les victimes sans défense se souviennent ou sont remémorées à partir d’une logique subjectiviste de la douleur et de l’impuissance (féminine). En partant de l’analyse un texte précis, Oblivion, d’une ex-prisonnière politique uruguayenne, Edda Fabbri, je souhaite analyser les étapes de déconstruction de cette polarité (héros-victime), en analysant comment la résistance à cette dichotomie structure les façons qu’a Fabbri de mettre en scène le passé. Résister aux deux catégories, celle de l’héroïne militante et celle de la victime sans défense, deviendrait alors une autre façon de penser le passé.

 

  • Luciana Messina (Universitad de Buenos Aires) : Entre innocence et héroïsme (PDF)
    Cet article s’intéresse aux tensions qui parcourent la catégorie de « victime » dans les politiques de la mémoire liées à l’élaboration de sites et de lieux du souvenir des crimes du terrorisme d’État en Argentine. Le point de départ de ce travail émerge avec les questions suivantes : comment sont construites, qualifiées et présentées les victimes dans les sites et lieux de mémoire de la ville de Buenos Aires ? Quelles sont les identités en jeu et comment sont-elles caractérisées dans les activités, débats et discussions qui constituent ces lieux ? Pour mener à bien ce travail, nous analyserons certains discours et pratiques produites dans le cadre d’une politique de la mémoire particulière, celle mise en place dans l’ex-centre clandestin de détention Olimpo. Nous nous centrerons plus précisément sur l’étude d’une activité qui met en avant les différences et similitudes aux sens donnés à la catégorie de victime.

 

 

Mémoire de la Shoah et de la terreur nazie

  • ÉTUDE : Luba Jurgenson (EUR’ORBEM) : Le Système périodique : cryptages et décryptages  (PDF)
    Dans le contexte des années 1960 et 1970 qui voient s’épanouir une littérature de la contrainte organisée selon le modèle scientifique, le projet de Levi de mêler ses deux métiers dans une œuvre faisant « système » peut être vu comme la conquête d’un territoire littéraire spécifique : contrairement à l’opinion répandue, celui-ci, loin de l’assigner à son identité de chimiste, consoliderait au contraire son statut d’écrivain. C’est probablement avec cette même visée que Levi fait alterner, dans ce texte en apparence autobiographique, des éléments testimoniaux et fictionnels, jouant avec son lecteur voire le déstabilisant en dépit de l’exigence de clarté qu’il affiche par ailleurs dans ses articles et interviews. Ce brouillage est probablement une réponse à la vaine recherche de clé pour comprendre le monde et pour comprendre Auschwitz (objectifs qui se rejoignent, car Auschwitz est bien de ce monde) : l’un et l’autre semblent être des « machineries » face auxquelles l’écrivain trame à son tour un système de cryptages.

 

  • Frediano Sessi (Université de Mantoue) : Primo Levi et la résistance  (PDF)
    Dans la nuit du 12 au 13 décembre 1943, Primo Levi est arrêté à Amay dans le Val d’Aoste, durant une action menée par la milice fasciste contre les partisans. À ses côtés, on arrête également Luciana Nissim, Vanda Maestro, Aldo Piacenza ainsi que Guido Bachi. Durant quelques semaines, ils avaient formé une bande de rebelles proche du mouvement de résistance Justice et Liberté (Giustizia e Libertà). Bien que cet épisode inaugura son calvaire en tant que Juif déporté à Auschwitz, Primo Levi ne parlera que très peu et sporadiquement de son expérience parmi les partisans dans la montagne. De fait, il la définira comme « la période la plus opaque » de son parcours. Il écrira « c’est une histoire de jeunes bien intentionnés mais imprudents et imbéciles, à classer parmi les choses à oublier ». Pourquoi un jugement aussi sévère doublé d’un silence interrompu uniquement par quelques pages d’histoires et d’allusions dans les œuvres littéraires et testimoniales ? L’exécution sommaire au cœur de la bande de deux jeunes qui, de par leurs actions, menaçaient la sécurité et la vie même du groupe de partisans peut certainement y avoir contribué. Et de toute façon, la reconstruction ponctuelle et documentée des semaines qui verront Levi passer du choix antifasciste à la lutte partisane ouvre d’autres perspectives et suggère un lien de continuité entre la vie partisane et la lutte pour la survie à Auschwitz.

 

 

  • Entretien avec Christophe Cognet (cinéaste) : De quoi l’image est-elle témoin ?  (PDF)
    Regard filmé. Des déportés dans les camps nazis sont parvenus à réaliser clandestinement des œuvres. Le cinéaste Christophe Cognet mène une enquête pour reconstituer les conditions pour ainsi dire impossibles dans lesquelles ces œuvres ont rendu la réalité concentrationnaire représentable. Comme si l’art – n’en déplaise à certains – allait bien au-delà du témoignage.

 

  • Désirée Schyns (Faculté de Linguistique appliquée de la Haute École de Gand) : Témoignage direct et témoignage des traces. Sarah Kofman, Hélène Berr et Dora Bruder à Paris pendant l’occupation allemande  (PDF)
    Cet article traite de l’exploration des discours sur l’évocation d’une mémoire douloureuse dans deux témoignages et dans une fiction. Quelle est la différence entre le témoignage et la fiction quand il s’agit de mémoire traumatisante ? Il s’agit de textes sur la persécution des Juifs à Paris pendant l’Occupation. D’abord, l’auteure évoque l’autobiographie Rue Ordener rue Labat de la philosophe Sarah Kofman, qui a consigné dans les années 1990 ses souvenirs des événements de l’Occupation et sa période de clandestinité ; ensuite la fiction Dora Bruder de Patrick Modiano, qui écrit à partir de la « mémoire de seconde main » sur la fugue d’une jeune fille juive, dont il suit l’errance dans Paris pendant les razzias qui auront finalement raison d’elle ; et en dernier lieu le journal d’Hélène Berr, écrit « sur le vif » entre 1942 et 1944. Quel est l’effet du décalage temporel qui marque les trois documents ? Expriment-ils un « désir de futur » et quelle transmission mémorielle assurent-ils ?

 

 

Questions de mémoire et de représentation

  • ÉTUDE : François-Xavier Destors (Auteur-Réalisateur – IEP Paris) : Rwanda 1994-2014 : Le génocide à l’épreuve de la fiction (PDF)
    Parmi le foisonnement d’œuvres artistiques qui construisent la mémoire du génocide perpétré contre les Tutsi du Rwanda depuis vingt ans, de nombreux cinéastes ont relevé le défi de la fiction. Plus d’une douzaine de longs-métrages de fiction ont ainsi vu le jour, en parallèle du temps de la reconstruction et de la justice, réalisés dans leur grande majorité par des cinéastes occidentaux. Le regard qu’ils engagent dans leur démarche de création et qu’ils portent à l’écran soulève plusieurs enjeux d’ordre historique, éthique et esthétique, tant vis-à-vis d’une vérité encore en train de s’écrire que de la mémoire des victimes. Comment s’approcher au plus près de l’événement en transgressant, par essence, le réel ? Comment donner à voir l’horreur des cent jours sans tomber dans le spectacle, le voyeurisme ou le traumatisme visuel ? Quelles stratégies narratives utiliser pour raconter l’inénarrable des survivants ? Comment suggérer, par la fiction, la nature même du crime, à savoir l’extermination planifiée et systématique de plus de 800 000 Tutsi du Rwanda ? Sous forme de bilan, cet article montre comment, au nom du réalisme et du « vraisemblable », les films qui abordent frontalement le génocide mettent en scène les potentialités et les limites de la représentation. Il insiste également sur les enjeux de l’espace cinématographique où s’élabore, pour le tiers comme pour le rescapé, le langage d’une mémoire à recomposer.

    Cette chronique régulière vise à présenter la façon dont se construit le souvenir du génocide des Tutsi au Rwanda depuis 1994. Elle prendra en compte les spécificités du modèle mémoriel rwandais, mais aussi les nombreux liens tissés avec des institutions travaillant sur la mémoire de la Shoah, sur le génocide des Arméniens ou encore le génocide cambodgien.

  • Christian Biet (Université Paris Ouest-Nanterre IUF) : Les leçons de l’Édit de Nantes ou les théâtres de la catastrophe (PDF)
    Dans une perspective heuristique, cet article compare deux périodes qui, l’une et l’autre, ont dû supporter la charge d’une catastrophe majeure, difficilement pensable, une catastrophe juste passée, et en parler malgré tout, de toute urgence, pour l’intégrer, ou non, dans le monde d’après. Ces deux périodes sont marquées par l’émergence et la constitution de deux mémoires : la mémoire des guerres du XVIe siècle au XVIIe siècle, et plus particulièrement la mémoire des guerres de Religion qui hante les esprits et les textes de la première partie du XVIIe siècle, et la mémoire relative à la Seconde Guerre mondiale et à la catastrophe d’Auschwitz, qui marque absolument notre présent. Ce sont deux périodes de « l’après » qui tentent, par leur théâtre, de consigner la catastrophe et la violence, de les figurer et, en les figurant, de les penser. Et, en considérant ce parallèle, on comprend que le théâtre, dans les questions qu’il pose, dans le dispositif qu’il installe et dans les formes qu’il propose, réagit aux catastrophes et aux dispositions que le pouvoir, ou l’opinion, propose vis-à-vis d’une mémoire possible des événements ou vis-à-vis d’un oubli nécessaire à l’harmonie du monde d’après. Dès lors la production théâtrale oscille entre un devoir de mémoire ou un devoir d’oubli, la nécessité de revenir à l’horreur ou la volonté de la dépasser malgré tout, l’impossibilité d’occultation face à la nécessité de concorde, l’expérimentation du détour par d’autres espaces, d’autres temps, par d’autres fables historiques pour parler de ce qui s’est passé.


  • Entretien avec Janine Altounian (écrivain et traductrice, Paris) : J’ai senti physiquement ce que c’était que d’appartenir à une minorité discriminée (PDF)
    Si en janvier 2015 on commémore l’ouverture du camp d’Auschwitz, en avril suivant, les regards se porteront sur le centenaire non d’une libération mais du premier génocide du siècle qui a frappé l’ensemble de la communauté arménienne de Turquie en 1915. Témoigner consacrera son prochain dossier non aux faits, mais à la construction de sa mémoire et à son actualité internationale. Ce sera donc pour le n° 120 sortant en mars 2015. Mais avant cela nous avons voulu rencontrer Janine Altounian.




  • Meïr Waintrater (ancien rédacteur en chef de L'Arche) : La toute-puissance des victimes (PDF)
    Israël et le Rwanda, États marqués par la mémoire d'un génocide, sont tous deux critiqués aujourd'hui pour un usage exagéré de la force dans les relations avec leurs voisins. Fondées ou non, ces critiques retournent, contre les anciennes victimes et leurs descendants, un argument qui était au cœur de la propagande prégénocidaire : celui d'une dangereuse puissance cachée sous une apparente faiblesse. Si le faible (la victime) est encore dans le fort (l'État), ne faut-il pas en déduire que le fort était déjà dans le faible ? La fantasmatique toute-puissance attribuée aux victimes risque alors de justifier des discours visant à la stigmatisation de celles-ci.






 

 

Questions historiques

 

 

 

 

 

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